Pour les 1ères / terminales : Filmer avec un téléphone portable + Ennio Morricone et les musiques de films (corrigé du DS)



Mobile Film Festival ? 1 mobile, 1 minute, 1 film 

Découvrir les 50 films sélectionnés pour cette année pour  «  Act now on climate change » :


Le format très court d’une minute imposé par le Mobile Film Festival empêche une chronologie traditionnelle. D’emblée, le spectateur est plongé dans une situation au présent dont on accentue l’intensité en laissant à l’imagination du spectateur le soin de reconstituer ce qui s’est passé avant ou après. 


Quel récit filmique pour évoquer l’exil ? 

Succession de 3 plans pour le début du film  qui racontent en voix off  le rêve déjà au passé de Mira de devenir footballeur professionnel. Fractionner le récit en changeant de plans pour accentuer l’effet de rupture (rupture de l’exil mais aussi heurts d’une histoire qui ne s’est pas faite de façon fluide et facile).

Plan rapproché fixe. Voix off + sons de battements de cœur. Mira raconte d’où il vient. Nécessité vitale de partir. Emotion …

Plan moyen fixe. Mira continue de raconter son histoire et il pose son ballon au sol et commence à dribbler.

Plan de demi-ensemble fixe : la caméra filme Mira de loin. Quel sens s’en dégage ?

Retour en arrière sur le passé de Mira. Rêve qui s’éloigne. Le ballon sort du champ. Mira court après son rêve et atterrit au plan suivant sur un amoncellement de parpaings d’où il extrait un câble électrique. Sa vie est encore en chantier.

Plan sur une ruelle étroite avec  un mur haut que Mira escalade après avoir lancé son câble (son rêve). On pense aussi au fil d’Ariane qui aide à ne pas se perdre et à sortir du labyrinthe. 

Plan suivant, il est dans la rue. Sur les fenêtres, des graffitis rigolos de drôles de têtes. Mira continue sa route en prenant bien soin de tirer son câble qui a dû mal à suivre. On dirait aussi un cordon ombilical qui le retient à ses origines. Mira traverse le champ de la caméra comme s’il traversait plusieurs pays. 

Plan où on le retrouve dans une cabane entourée par son câble. Il évoque qu’il est sans domicile fixe à Paris. Le récit joue avec les rimes. On passe des difficultés à la joie sans s’appesantir.
Arrivée dans la cour des Grands voisins, village solidaire.

Le film se termine par plans rapprochés sur le micro.  Mira est sur le point de réaliser son rêve :

« Stabilité, tout est plus clair, laissez-moi enfin le droit de rêver. »

Mira prend le soin de raccrocher son câble au micro pour relier les choses entre elles. Ses origines, son passé à son présent et son futur dans lequel il peut enfin se projeter. La caméra peut enfin s’éloigner. Mira a atteint son but : trouver un pays d’accueil et réaliser son rêve de musicien. 

Aux battements du cœur, on a maintenant les claquements des baguettes pour la batterie. 

Début énergique du morceau avec tous les musiciens puis tout s’arrête brusquement mais la musique s’est déjà installée dans nos têtes et plus rien ne peut l’arrêter. Nous sommes portés par la formidable énergie de Mira qui a su trouver sa voie, son chemin pour se réaliser.

Le film avec portable ici  n’est pas forcément très visible d’un point de vue esthétique. Mais ce qui fait la valeur de ce film, c’est la grande inventivité de la mise en scène, le ton très optimiste du film d’un homme qui a su trouver l’énergie en soi pour ne jamais s’arrêter et la formidable adéquation entre l’écriture des plans et le sens qui s’en dégage. Ainsi, pour dire le rêve qui s’éloigne les plans s’éloignent, pour dire la traversée, Mira traverse le champ, pour dire la nécessité intérieure c’est voix off + battements de cœur, pour dire qu’il a réussi, la caméra se recule pour montrer Mira en plan d’ensemble. Tout est déjà dit dans la manière de filmer !

Raahha : utilisation d’une esthétique de film amateur.  


Image floue de mauvaise qualité. Pas de cadrage maîtrisé. Axe de prise de vue oblique. Plans rapprochés. Secousses de la caméra.  Musique du bus avec paroles échangées. La mère prend la caméra pour filmer le garçon qui agite une voiture jaune à côté de son papa. Fondu enchaîné au noir avec le bruit d’une sirène de bateau qui annonce le départ ou l’arrivée d’un paquebot. 

La caméra recule et on découvre une main gantée qui tient le portable où est visionné le film. 

La caméra recule encore et on découvre la tragédie avec les sauveteurs qui tentent de sauver les victimes échouées sur la plage. On repère la voiture jaune et la carte qui nous permettent d’identifier les victimes. 

Chants de femmes qui accompagnent le drame. 

La caméra ne filme pas les visages. Pas besoin de voyeurisme. Ces victimes deviennent les témoins d’un drame universel.

Pourquoi la caméra passe de mains en mains ?

Au début le téléphone sert à filmer puis il sert d’écran. Effet de distanciation qui s’opère. On perçoit que nous-même on est face à un écran pour regarder ce film. 

Ces écrans sont les barrières dont on doit s’affranchir pour ne plus voir ce drame des migrants comme un spectacle ou une fiction qui nous tiennent à distance mais comme une terrible réalité sans horizon à laquelle le film nous incite à faire face. 

Film qui passe de mains en mains : notion d’entraide et de solidarité, ces témoignages doivent circuler pour nous faire réagir.



Exiguïté des espaces, notamment l’habitacle de la voiture dans lequel le téléphone peut plus facilement filmer qu’une caméra. 

Plans rapprochés privilégiés pour créer une intimité avec les personnages ou gros plans. On est à l’étroit dans cette histoire.

Très peu de paroles échangées : Papa … Léo 

Le père devenu femme raccroche, sourit, pose le portable.

La musique assez  douce avec une voix d’homme qui chante commence au moment où il met la clé de contact.

Gros plan sur la roue boueuse à l’arrêt sur les rails. 

La caméra reste fixe. On va la voiture quitter le champ et s’éloigner dans un paysage hivernal de campagne. Le père a échappé au suicide.

Un train traverse rapidement et brusquement le champ. Le drame a été évité de justesse.

Beaucoup de temporalités différentes dans ce film qui créent une intensité dramatique.

Plan rapproché sur une photo du père, liste de numéros de téléphone, un gant de boxe et la même petite grenouille qui fait le lien entre le fils et le père. 


Tommy Weber « Je ne t’aime pas » 2018

Un film fait pour être vu avec son portable comme si on discutait par téléphone avec une amie. Format vertical. 

Icônes, smiley, SMS, tous les codes d’une communication dépersonnalisée sont mis en scène.

Utilisation du téléphone portable par Clara comme un bouclier pour ne pas affronter la réalité de son père mourant mais la tenir à distance. 

Utilise la caméra pour se filmer, se photographier. Elle se met en scène comme dans ce road movie désabusé en Bretagne. Le selfie prend ici toute sa signification d’exhibition. D’ailleurs elle en joue en se faisant passer pour la jeune amoureuse à côté du vieil ami de son père.

Michel Gondry, Détour, 2017 


Vidéo où Gondry explique comment il a filmé avec l’IPhone : 


« J'ai déjà tourné avec des caméras non professionnelles, mais là, ça apporte une vraie légèreté". Gondry

« Du côté d'Apple qui a accompagné la sortie de Détour d'une vaste campagne d'affichage à Paris, il semblerait que ce ne soit pas tant le court-métrage qui l'intéresse que les tutoriels qui accompagnent sa mise en ligne. "Dans l'oeil de Michel Gondry" présente six vidéos qui viennent percer les secrets du réalisateur pour réussir vos films sur iPhone 7, avec au programme le procédé image par image, l'effet cinéma, l'accéléré, le ralenti, la scène de nuit ou encore l'illusion d'optique. Moins visible, mais tout aussi percutant pour Apple, ce court-métrage réalisé en ultra-haute définition a également eu recours à l'application Filmic Pro qui a permis à l'équipe de Michel Gondry de bénéficier de réglages encore plus poussés, notamment sur l'exposition et la balance des blancs. »


L’effet cinéma : https://vimeo.com/227371905

Image par image : https://vimeo.com/227371821

Illusion d’optique :https://vimeo.com/227371746




Ennio Morricone 

La musique du début «  Les poings dans les poches » : Voix féminine. Pas de paroles mais des sons. Reprise d’une même mélodie. Apparition du piano. Son de carillons ou de cloches qui se surajoutent à la voix jusqu’à produire un ensemble dissonant. Les notes s’accumulent. La voix continue toujours. Le carillon s’intensifie. Crescendo puis tout retombe et on distingue de nouveau la voix et les sons plus distinctement. Impossibilité de la voix et des sons à trouver une harmonie comme les personnages dans le film. 

« La musique annonce la couleur du film car déjà le chant de la femme ne contient aucune parole mais surtout, on dirait qu’elle est seule dans un endroit vide car sa voix a un effet un peu de résonnance… Ce qui peut vouloir montrer la solitude des personnages qui vivent dans la maison familiale. De plus, il y a tous les autres instruments qui, on dirait, cherchent à recouvrir la voix, ce qui fait désordre et bizarre, pour annoncer l’étrangeté du film, le désordre qui règne dans cette famille. » Samantha, 1ère

Sergio Leone a dit : Avec Ennio il faut travailler comme ça. Si vous avez le temps la patience de lui expliquer le film, de beaucoup parler avec lui, il vous donnera sûrement des morceaux fabuleux. 
Leone rendait notamment hommage à la grande souplesse et capacité d'écoute du compositeur :
Par exemple quand je faisais “Il était une fois en Amérique”, je l’ai obligé à placer "Amapola" dedans, une vieille chanson américaine. Il a supporté ça. Même chose pour "Leningrad", car Chostakovitch va jouer un rôle très important. Mais ça ne fait rien parce qu’Ennio travaille d’une façon complètement spéciale avec moi. Je fais composer la musique avant de faire le film. Je travaille avec la musique. C’est une complicité, non pas de l’histoire, mais de l’idée.

C’est plus qu’un couple, c’est comme une sorte de mariage involontaire", confiait Sergio Leone à Noël Simsolo au sujet de son duo avec Ennio Morricone. C'était le 24 février 1989, dans l'émission Euphonia... deux mois avant sa disparition :

On se connaît depuis longtemps. Je n’aime pas du tout me répéter et expliquer les choses plusieurs fois, et avec Ennio, c’est très facile, en un regard, nous nous comprenons tout de suite. Il y a le succès que nous avons eu ensemble, l’estime que nous avons l’un pour l’autre… Il est capable de réécrire un morceau de musique quatre ou cinq fois si je ne l’aime pas du tout. [...] C’est plus qu’un compositeur pour moi. Je n’aime pas du tout les mots dans les films, j’espère toujours faire un film muet, et la musique se substitue aux mots, alors on peut dire que Morricone est l’un de mes meilleurs scénaristes.

Pour en savoir plus sur la collaboration entre Sergio Leone et Ennio Morricone :


Commentaires