Pour tous : Restitution de la rencontre du réalisateur Olivier Nakache avec des lycéens, le 15 mai 2020
Éric Toledano, Benjamin Lesieur et Olivier Nakache, le 13 janvier, lors de la soirée des révélations des César à Paris. LP/Frédéric Dugit. Photo parue dans Le Parisien, le 16 janvier 2020
Rencontre ZOOM avec Olivier Nakache le vendredi 15 mai pour son film Hors normes : questions de lycéens de
différents établissements et réponses du réalisateur- Animateur de la rencontre
pour le Ministère de l'Éducation nationale : Éric Rostand
Qui
est vraiment Hors normes ?
La
société se doit d'être normée sinon ça partirait dans le chaos. Dans le milieu
médical, il y a des protocoles à respecter mais dans le cas des autistes
lourds, il y a des initiatives qui viennent de la société civile qui sortent des
clous pour tenter des choses.
On
a donné le titre Hors normes parce que la singularité de ces jeunes les fait
sortir des normes. Les éducateurs, les représentants sont hors normes aussi. Le
titre s'est rapidement imposé. La norme, il faut la questionner sans tomber
dans la désobéissance civile. La désobéissance civile doit être orientée vers
des actions positives.
Pour
la musique originale, est-ce que les Grandbrothers
vous ont proposé plusieurs morceaux ?
Depuis
Intouchables, on essaie de trouver la musique pendant le film. Jacques Audiard
a trouvé avec Alexandre Desplat un compositeur qui est son alter ego. Nous on
n'a pas encore trouvé notre alter ego. . On repère des groupes comme pour
Ludovico Einaudi par exemple. Quand leur musique passe le temps, ça veut dire
qu'on ne s'en lassera pas.
Dans
le film on montre des stéréotypies, ce sont des gestes à répétition. On
cherchait une musique similaire avec des boucles qui rentrent dans la tête et
qui va fouiller loin. Ainsi dans le film, il y a une musique avec au début des bips
qui inquiètent puis au fur et à mesure la musique se calme et se déploie. Pour
le travail de la musique, on prend le thème des musiciens et on réenregistre la
musique avec le film.
Est-ce
que la religion joue un rôle important dans le film ?
Leur
association est hyper laïque. Leur but commun c'est de soulager les mômes. La
question qu'on peut se poser c'est est-ce qu'il faut avoir une foi particulière
pour aider les hommes ?
Le
but du jeu est d'être un bon référent. Hors normes c'est comme un
mille-feuille. Pourquoi ce sont eux les religieux qui ont fait bouger les
choses ? Ils ne font pas de prosélytisme. Ils sont bons dans ce qu'ils font
avant d'avoir la foi. Benhamou appartient à un courant religieux qui cherche à
aider les autres dans le monde entier. Eux ce sont des dépollueurs. Ils
dépolluent un peu pour que ça aille mieux.
Quelle
a été la direction d'acteurs pour les autistes ?
Il
a fallu créer une relation de confiance entre les techniciens et les comédiens.
On a fait des mini stages pour que les gens se rencontrent. On a pris des
précautions particulières en amont. On s'est dit que si un jour, un autiste ne
voulait pas tourner, on tournerait un autre jour. On s'est adaptés. À l'écran,
la plupart des éducateurs sont de vrais éducateurs.
Comment
avez-vous choisi les lieux de tournage ?
On
a tourné dans les vrais lieux de vie comme dans les locaux de l'association de
Benhamou. Seul l'hôpital a été recréé
dans une partie désaffectée d'un hôpital.
Oups,
j'ai oublié de noter la question !
Notre
ambition est de faire du cinéma avec du rire, de l'émotion et de l'action.
(…)
A la fin du film, il n'y a plus de musique. C'était intéressant de jouer avec
le silence quand on retire le casque de protection de Valentin.
Est-ce
que c'est un film que vous avez aimé réaliser ?
Olivier Nakache : Je te retourne la question. Qu'en penses-tu ?
L'élève : Oui
Olivier Nakache : Oui évidemment. Quelle chance d'aller faire un métier qu'on aime quand
on se lève le matin. Je vous conseille de lire à ce sujet le livre de Rainer
Maria Rilke qui s'appelle "Lettres à un jeune poète". On juge une
œuvre à la nécessité qu'elle a d'exister. Pour nous, il faut que le film soit
nécessaire pour qu'il existe et qu'on ait envie de montrer notre point de vue.
Comment
avez-vous l'inspiration pour vos films ? Est-ce que vous êtes toujours sur la
même longueur d'ondes avec votre réalisateur ?
Un
film c'est comme un mariage. Tu te maries avec un sujet pour la vie. On ne
choisit pas un sujet en fonction de ce que les gens ont envie mais en fonction
de ce qui pour nous est important. On essaie d'être là où on ne vous attend pas
pour surprendre. Ce sera notre point de vue à nous. On essaie de trouver des
sujets originaux mais ce sont surtout des sujets qui nous intéressent. Ce qui
est important c'est la curiosité. Il faut aller vers ce qu'on pense qu'on ne va
pas aimer. Des fois, on trouve ainsi des petites pépites.
On
discute beaucoup entre nous et à partir d'un moment on se décide.
Quel
est le point de départ de votre travail de cinéastes ?
L'obstination
fait partie du talent. On s'est rencontrés très jeunes en colonies de vacances.
À 17-19 ans. On s'est alors demandés : Qu'est-ce qu'on fait ? Faut trouver une
caméra, faut écrire une histoire, faut faire des stages.
À
chaque film, on repart à zéro. Il faut faire, c'est tout. Vous vous avez des
téléphones, des tablettes et bien, il faut faire.
Nous
on a commencés avec le court métrage "Les petits souliers" en 1998.
Si
tu veux faire comédien, prends des cours de théâtre. Si tu veux être réalisateur,
fais des films.
Notre
film "Nos jours heureux"(2006) est un agrégat de nos souvenirs de
colonies de vacances. Les premiers films parlent souvent de la vie des
réalisateurs.
Pourquoi
avez-vous eu envie de montrer cette seconde chance des jeunes de la cité ?
Dylan
c'est nous les personnes extérieures et c'est par lui que nous faisons la
découverte de ce milieu-là. Dans le processus de création du film, Dylan n'a
pas fait de stage pour être au plus près des réactions d'une personne qui
découvre comme les spectateurs l'univers des autistes.
Avec
les jeunes référents, il y a de la comédie mais aussi pour les responsables
comme pour le speed dating de Bruno (Vincent Cassel) qui montre comment son
sacerdoce a un peu d'oxygène et de légèreté avant de repartir dans le dur.
Comment
avez-vous réagi aux critiques du film ?
Quand
on fait un film, le but ce n'est pas de plaire à tout le monde. S'il y a des
gens qui ne sont pas contents alors qu'ils ne regardent pas le film. Ça fait
vingt ans qu'on connait ces associations là et elles méritaient largement ce
film.
Avec
la scène du voisin, le but c'est de faire rire ou c'est juste de montrer qu'il
faut faire taire ces personnes autistes ?
Le
premier sens c'est de montrer ces appartements où les enfants vivent et le
nombre des éducateurs. Cette scène-là, on l'a vécue. La première fonction,
c'est une scène de comédie et la deuxième lecture, c'est qu'ils vivent avec
nous. On va ainsi annihiler la violence de l'indifférence.
Comment
avez-vous travaillé avec les enfants ?
Quand
tu fais un film, tu dois tout anticiper, tout penser. C'est évident que toutes
les personnes notamment les enfants qui sont dans le film, on a leur
assentiment ou l'autorisation des parents.
Est-ce
que vous faites tout en duo ou vous vous partagez les tâches ?
On
fait tout à deux, c'est un binôme depuis l'écriture jusqu'à la sortie du film.
J'ai
bien aimé votre film parce que peu de personnes connaissent le travail des
éducateurs et une réalité dure mais belle. Malgré le handicap le film montre
que ce sont des humains.
Merci,
ça me touche.
La
danse est omniprésente dans vos films ?
Il
n'y a pas un film qu'on a fait où il n'y a pas une scène de danse. On a fait
beaucoup de boulots différents. Pendant douze ans, j'ai fait DJ. Donc, j'ai vu
beaucoup de gens danser et à chaque fois, le corps parle, le corps ne ment pas.
Cet incroyable-là nous fascine. Quand les gens se lâchent, cela exprime autre
chose. La poésie est dans cet écart entre notre apparence et ce qu'on révèle de
nous à travers le langage du corps.
Oups
oubli, la question n'a pas été notée !
On
a eu la chance de présenter le film aux représentants de l'état. Maintenant, la
vie est plus facile et c'est certain que le film a permis de gagner quelques
batailles. Le film leur a apporté une notoriété.
Y'a
pas une heure où tu ne ris pas quand tu es avec ces associations mais dans Hors
normes, il y a tout. On n'omet pas la difficulté et le drame.
Trouvez-vous
que le handicap est assez représenté dans le cinéma français ?
Ce
n'est pas une question qui m'habite. Je me dis qu'il y a des questions qui
traitent de personnes vulnérables qui ne sont pas assez représentées. Il ne
faut pas de quotas. Il faut que ça parte de l'envie des réalisateurs de parler
de certains sujets. Peut-être que cette période de confinement va permettre de
réfléchir davantage à la vulnérabilité.
Il
y a des films sociétaux qui s'intéressent aux gens différents.
Quel genre de
films préférez-vous ? Quel réalisateur vous admirez le plus ?
On
aime tous les genres de cinéma. Woody Allen avec Annie Hall…, Claude Lelouch
avec La Bonne Année, Un homme et une femme, Claude Sautet, Bong Joon-ho avec
Parasite. On aime bien certains acteurs aussi comme Gary Oldman, Lino Ventura mais malheureusement, on ne pourra plus travailler avec lui. On aimerait
bien travailler avec Mathieu Amalric, Jean Dujardin aussi, Louis Garrel… on a
encore beaucoup d'acteurs à découvrir.
Remerciements
respectifs et fin de la rencontre.
Pour
suivre le travail des deux réalisateurs :
Restitution
individuelle écrite ou filmée (Si certains d'entre vous préfèrent – Dans ce cas
me renvoyer votre petit film via Wetransfer à mon adresse académique
professionnelle) Restitution à rendre le 20 mai car la fin de la semaine est
fériée :
Pour ceux qui n'ont pas pu assister à la rencontre
du 15 mai organisée par le Ministère de l'Éducation nationale via ZOOM, lire
l'interview d'Olivier Nakache par des lycéens de différentes académies. Les
élèves qui étaient en ligne peuvent bien sûr la lire également s'ils en ont
envie !
Puis répondre au questionnaire suivant :
- Qu'est-ce qui retient ton attention dans l'interview d'Olivier Nakache et pourquoi ?
- Quel(s) point(s) commun(s) et quelle(s) différence(s) entre les films que vous avez vus autour de l'autisme : Hors normes d'Eric Toledano et Olivier Nakache et Quelle folie de Diego Governatori ?
- Quelles qualités cinématographiques du film Hors normes mettrais-tu en avant ?
- Quelles qualités cinématographiques du film Quelle folie mettrais-tu en avant ?
- Qu'as-tu pensé de ce dispositif de rencontre virtuelle avec un réalisateur ?
- Aimerais-tu que cela se renouvelle ?
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